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3. Comment passe-t-on de la nature à la culture ?

Sommaire

NOTIONS COMPLÉMENTAIRES : SCIENCE, RELIGION, TECHNIQUE, LANGAGE

Le mythe de Prométhée

Platon : Le mythe de Prométhée, Protagoras (Ve s. avant J.-C.)
C’était au temps où les Dieux existaient, mais où n’existaient pas les races mortelles. Or, quand est arrivé pour celles-ci le temps où la destinée les appelait aussi à l’existence, à ce moment les Dieux les modèlent en dedans de la terre, en faisant un mélange de terre, de feu et de tout ce qui encore peut se combiner avec le feu et la terre. Puis (…) ils prescrivirent à Prométhée et à Épiméthée de les doter de qualités, en distribuant ces qualités à chacune de la façon convenable. Mais Épiméthée demande alors à Prométhée de lui laisser faire tout seul cette distribution : “Une fois la distribution faite par moi, dit-il, à toi de contrôler !” Là-dessus, ayant convaincu l’autre, le distributeur se met à l’œuvre.
En distribuant les qualités, il donnait à certaines races la force sans la vélocité ; d’autres, étant plus faibles étaient par lui dotées de vélocité ; il armait les unes, et, pour celles auxquelles il donnait une nature désarmée, il imaginait en vue de leur sauvegarde quelque autre qualité : aux races, en effet, qu’il habillait en petite taille, c’était une fuite ailée ou un habitat souterrain qu’il distribuait ; celles dont il avait grandi la taille, c’était par cela même aussi qu’il les sauvegardait. De même, en tout, la distribution consistait de sa part à égaliser les chances, et, dans tout ce qu’il imaginait, il prenait ses précautions pour éviter qu’aucune race ne s’éteignit. (…)
Mais, comme Épiméthée n’était pas extrêmement avisé, il ne se rendit pas compte que, après avoir ainsi gaspillé le trésor des qualités au profit des êtres privés de raison, il lui restait encore la race humaine qui n’était point dotée ; et il était embarrassé de savoir qu’en faire. Or, tandis qu’il est dans cet embarras, arrive Prométhée pour contrôler la distribution ; il voit les autres animaux convenablement pourvus sous tous les rapports, tandis que l’homme est tout nu, pas chaussé, dénué de couvertures, désarmé. (…)
Alors Prométhée (…) dérobe à Héphaïstos et à Athéna le génie créateur des arts, en volant le feu (car, sans le feu, il n’y aurait moyen pour personne d’acquérir ce génie ou de l’utiliser) ; et c’est en procédant ainsi qu’il fait à l’homme son cadeau. Voilà donc comment l’homme acquit l’intelligence qui s’applique aux besoins de la vie. (…)
Et c’est de là que résultent, pour l’espèce humaine, les commodités de la vie (…)
Or, puisque l’homme a eu sa part du lot Divin, il fut, en premier lieu le seul des animaux à croire à des Dieux ; il se mettait à élever des autels et des images de Dieux. Ensuite, il eut vite fait d’articuler artistement les sons de la voix et les parties du discours. Les habitations, les vêtements, les chaussures, les couvertures, les aliments tirés de la terre, furent, après cela, ses inventions.
1. Résumez le mythe de Prométhée raconté par Socrate.
2. “Épiméthée” signifie étymologiquement ; “celui qui réfléchit après avoir agi” ; et “Prométhée” : “le prévoyant, celui qui réfléchit avant d’agir”. Expliquez en quoi le premier symbolise la nature et le second la culture.
3. Qu’est-ce qui distingue l’homme des autres animaux selon ce récit ?

Compléments vidéo

Résumé du mythe de prométhée

Le mythe de Prométhée selon Luc Ferry

Extrait de « 2001, l’Odyssée de l’espace » (Stanley Kubrick, 1968)

Résumé

En plein désert, deux tribus de grands singes s’affrontent autour d’un point d’eau. L’apparition d’un mystérieux monolithe fascine l’un des primates, qui bientôt crée l’outil lui permettant de dominer ses congénères.

EXERCICE

1) Faire un tableau à deux colonnes : ANIMAL | HUMAIN. Remplissez-le : 1ère colonne (1ère partie de l’extrait) : les signes qui rattachent ces préhumains à l’animalité ; 2ème colonne (2ème partie de l’extrait de l’extrait) : les signes qui rattachent ces préhumains à l’humanité. 2) Que symbolise le monolithe noir ? En quoi illustre-t-il le mythe de Prométhée ?

Complément : Genre, espèce, individu

Aristote affirme qu’il faut définir un terme par sa différence spécifique et son genre prochain. Le genre prochain est la famille à laquelle appartient une chose, et la différence spécifique est ce qui distingue cette chose des autres, son “essence” ou, en biologie, l’espèce.

En biologie, on a coutume de dire qu’une espèce se compose de l’ensemble des individus capables de se reproduire entre eux. Pour Pierre-Henri Gouyon, du Muséum d’histoire naturelle de Paris, cette définition est invalide, dans la mesure où de nombreux contre-exemples existent. Le mot “espèce” est donc à utiliser avec prudence, comme une notion toute relative, pour décrire le buisson de l’évolution.

Le concept de néoténie

Peter Sloterdijk, La domestication de l’être (2000)
Selon les travaux des biologistes et des psychologues, l’enfant humain aurait besoin d’une gestation de vingt et un mois s’il devait atteindre dans le ventre de sa mère l’état de maturité qu’ont les primates à leur naissance. Or il doit naître au bout de neuf mois au plus tard, afin d’utiliser sa dernière chance de passer par l’ouverture du bassin maternel.
(…) Le corps humain a pu se permettre, en raison de la technique de couveuse de groupe, avec son efficacité et sa stabilité à long terme, d’emporter dans le temps présent des éléments de son passé fœtal et infantile. C’est précisément pour cette raison qu’il doit apprendre à protéger d’une manière de plus en plus explicite ses propres couveuses - qu’on nommera plus tard : sa culture.
(…) On pourrait ainsi dire : parce que les corps des pré-hommes deviennent de plus en plus des corps de luxe – et tout luxe commence par le fait de pouvoir être immature, de préserver et de vivre jusqu’au bout un passé infantile -, les hommes doivent se prendre eux-mêmes sous bonne garde et devenir des animaux soucieux, c’est à dire des créatures vivantes qui prennent aujourd’hui des mesures concernant le lendemain et le surlendemain.
1. Sloterdijk décrit dans ce texte le phénomène biologique de “néoténie”. Expliquez ce concept.
2. Qu’est-ce que la culture, selon Sloterdijk ? Pourquoi les autres animaux n’en ont-ils pas réellement besoin ?
3. Quel rapport voyez-vous entre cette théorie scientifique et le mythe de Prométhée ? Une théorie scientifique est-elle semblable à un mythe ?

Complément vidéo